Lettre de recommandations de la diaspora africaine

Lettre de recommandations de la diaspora africaine

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**LETTRE DE RECOMMANDATIONS DE LA DIASPORA AFRICAINE**

30 août 2024, Salvador, Bahia

En rendant hommage à l’ancestralité et en célébrant la diversité des voix afro-diasporiques d’experts, de personnalités culturelles, de références de mouvements sociaux et d’autres représentants de la société civile ;

Rappelant la Conférence des Intellectuels d’Afrique et de la Diaspora, tenue à Dakar en 2004, la 2ème Conférence des Intellectuels d’Afrique et de la Diaspora, tenue à Salvador en 2006, et le Sommet Mondial de la Diaspora Africaine, tenu à Johannesburg en 2012 ;

Réaffirmant la Déclaration et le Programme d’Action de Durban, adoptés en 2001, rappelant la proclamation de la Décennie Internationale des Personnes d’Ascendance Africaine (2015-2024) et soutenant son renouvellement pour dix ans supplémentaires ;

Célébrant la Décennie des Racines Africaines et de la Diaspora Africaine (2021 à 2031) établie par l’Union Africaine ;

Considérant la nécessité d’établir un nouveau paradigme de l’humanité, qui intègre les valeurs philosophiques et épistémologiques que la Diaspora hérite de l’Afrique, telles que la circularité, la lucidité et la base matriarcale ;

Nous, les participants à la 1ère Conférence de la Diaspora Africaine dans les Amériques, réunis les 29 et 30 août 2024 à Salvador, nous adressons aux autorités de l’Union Africaine et des pays des Amériques qui se réuniront le 31 août 2024, ainsi qu’au 9ème Congrès Panafricain, à Lomé, du 29 octobre au 2 novembre 2024, pour faire les recommandations suivantes concernant le « Panafricanisme, Mémoire, Restitution, Réparation et Reconstruction »

1. Renforcer la philosophie Ubuntu autour du Panafricanisme au XXle siècle, caractérisé par la reconnaissance de l’unité et de la circularité culturelle, spirituelle et linguistique entre les peuples africains et la Diaspora, composée de ses communautés émigrées et des populations d’origine africaine vivant dans des pays d’autres continents. 

2. Intégrer les idéaux du Panafricanisme et de la philosophie Ubuntu dans les efforts visant à rechercher des réparations et à réformer les institutions internationales et les politiques internes des États, en augmentant la représentation des pays africains dans les organisations et forums internationaux, et en coordonnant les positions entre les pays africains et afro-diasporiques sur les thèmes d’intérêt commun dans ces forums et organisations 

3. Dans l’esprit de l’établissement de la 6ème région de l’Union Africaine, le groupe de  planification Panafricaniste appelle l’Union Africaine à établir une agence permanente, de  préférence à Salvador, Bahia, comme un moyen/outils pour restaurer l’histoire du  Panafricanisme qui reconnaît la contribution des femmes, des jeunes, des mouvements  sociaux de base, etc., afin de développer une conscience Panafricaine parmi les communautés  des peuples africains, en utilisant des technologies traditionnelles et nouvelles.

4. Organiser, renforcer et financer des réseaux mondiaux académiques, éducatifs, artistiques, culturels et politiques pour le dialogue, la préservation et le droit à la mémoire, aux savoirs ancestraux et spirituels et à l’histoire partagée entre les populations africaines et de la Diaspora, y compris l’élaboration de cartographies. 

5. Identifier, inventorier et promouvoir le patrimoine culturel des peuples afro-diasporiques, en mettant en avant les femmes en tant que sujets centraux de la production et de la préservation de |’identité, du savoir, de la culture et de la mémoire, 

6. Encourager la création d’initiatives transnationales de musées, bibliothèques et dépôts de la Diaspora Africaine et un réseau d’archives africaines et de la Diaspora axé sur la sauvegarde et l’accès à la documentation sur différents supports. 

7. Encourager la création de programmes éducatifs complets intégrant l’inclusion des histoires et mémoires africaines et de la Diaspora à tous les niveaux d’enseignement avec le soutien de forums et de fonds spécifiques pour partager les meilleures pratiques dans les pays africains et de la Diaspora africaine 

8. Combattre le racisme algorithmique dans le contexte des nouvelles technologies par la régulation, l’augmentation de la représentation des personnes noires sur les réseaux sociaux, la garantie de l’intégrité de l’information relative à l’histoire de l’Afrique et de la Diaspora, et l’établissement d’une base de données ouverte contenant des informations pertinentes pour la préservation de la mémoire africaine et afro-diasporique 

9. Renforcer, encourager et financer adéquatement des politiques antiracistes de  développement durable et de promotion des droits pouvant inclure : la restructuration des  matrices énergétiques, avec le développement de sources renouvelables et sûres ; la production alimentaire efficace et les programmes de lutte contre la faim, la pauvreté et  l’insécurité alimentaire ; la durabilité et la justice environnementales; la révision des systèmes  de justice, y compris pénal et criminel ; des stratégies de santé élargies; prenant en compte  les spécificités épidémiologiques de la diversité des pays et permettant des actions de  prévention et d’éradication des maladies, ainsi que la promotion de la santé mentale  l’éducation et les programmes scolaires qui reconnaissent la contribution des peuples  africains et afro-diasporiques, leurs connaissances, culture et traditions, et renforcent  l’identité noire, avec une attention particulière aux enfants et aux adolescents, à l’éducation  en milieu rural ; à la promotion de l’égalité des sexes et à la lutte contre la violence ; à la  promotion de l’accès au logement ; la reconnaissance de la traite des esclaves comme un  crime contre I’humanité par les pays historiquement impliqués ; l’augmentation de la  participation des personnes d’ascendance africaine, en particulier des femmes dans les forums de débat et les espaces de pouvoir internationaux et  nationaux. 

10. Renforcer la coopération internationale dans des projets dédiés aux liens entre le  continent africain et la Diaspora, notamment par : la facilitation de la mobilité et du soutien  aux étudiants, aux enseignants et aux chercheurs ; le renforcement des institutions et des  programmes éducatifs favorisant la mobilité des étudiants africains et afro-diasporiques ; la  création de l’Université Fédérale Afrique-Brésil en Bahia, en élargissant la coopération avec d’autres pays africains et afro-diasporiques ; l’échange entre les communautés afro-descendantes traditionnelles pour partager les connaissances, y compris entre générations et en tenant compte des spécificités de chaque peuple.

11. Gérer et défendre les intérêts de la Diaspora, par la création d’une institution multilatérale ayant son siège à Salvador.

12. Promouvoir la gestion des connaissances, axée sur la communauté noire afro-diasporique par la promotion, la formation et la valorisation des gestionnaires de l’égalité raciale ; la réalisation de recensements de la Diaspora Africaine, comme moyen de savoir combien et qui sont les afro-descendants dans chaque pays et dans le monde et comment ils se déplacent entre I’Afrique et le monde ; la promotion de ‘inclusion numérique, notamment parmi les jeunes.

13. Promouvoir la pleine mise en œuvre de la Déclaration et du Plan d’Action de Durban, par une conception holistique de la réparation dans  les dimensions politique, économique financière et sociale, y compris la reconnaissance de l’esclavage et de la traite transatlantique comme crime contre l’humanité ; Considérer la réparation comme moyen de lutter contre le racisme institutionnel, pour l’intégration pleine des africains, dans les sociétés afro- diasporiques et pour garantir la redistribution du pouvoir ; Ces Recommandations doivent être atteintes par :

  • Des institutions nationales et internationales dédiées au thème et un financement par des fonds spécifiques provenant des anciennes colonies et des institutions esclavagistes pour promouvoir le développement économique, social et culturel des populations africaines et afro-descendantes, tant en Afrique que dans les pays de la Diaspora africaine ;
  • Une large participation sociale qui reconnaisse les besoins locaux et communautaires ;
  • La diffusion de moyens statistiques reconnaissant l’existence des populations africaines et empêchant leur invisibilisation ;
  • La création de mécanismes internationaux, comme une Commission des Réparations au Conseil des Droits de l’Homme, un Tribunal international des réparations, et la conclusion de la négociation de la Déclaration Internationale des Nations Unies sur ‘les Droits des Peuples Afrodescendants ;
  • L’encouragement de la coopération internationale en matière de politiques de réparation avec la création d’un portail électronique réunissant des informations sur la question dans diverses langues ;
  • L’établissement de la lutte contre les mesures coercitives et les sanctions qui empêchent l’avancement des droits sociaux des populations afro-diasporiques.

14. Promouvoir les droits de la population noire en Afrique et dans la Diaspora, y compris la population migrante, en priorisant la santé et le bien-être des peuples d’Afrique et de la Diaspora, et en affrontant les préjudices persistants découlant de l’esclavage, du colonialisme et du néocolonialisme, y compris l’adoption de politiques de santé mentale et physique  accessibles et spécifiques pour la population noire, des politiques de sécurité publique  antiracistes, notamment pour la jeunesse noire, et des politiques de travail décent, y compris  pour les personnes libérées du système carcéral. 

15. Promouvoir des politiques sociales et intersectionnelles de protection pour les femmes,  les personnes âgées, les enfants et les jeunes, les personnes en situation de détention, les  personnes en situation de handicap, et les personnes migrantes, et créer des  mécanismes, y compris financiers, pour assurer une plus grande participation des femmes  dans les espaces de pouvoir en politique et dans le secteur privé, et encourager le dialogue  interreligieux pour la promotion de la paix et d’une culture de tolérance. 

16. Établir des fonds dédiés à la restitution des biens culturels matériels et immatériels, des ressources naturelles et d’autres patrimoines historiques qui ont été détruits ou injustement arrachés aux Africains et à leurs descendants, ainsi qu’à la préservation de ces biens, afin de reconnaître et de rendre visible la contribution intellectuelle, spirituelle, scientifique et technologique du peuple africain. 

17. En tant que politiques réparatrices, garantir la distribution de terres et l’accès aux  territoires pour les communautés traditionnelles, y compris dans les endroits où les personnes afrodescendantes ont été systématiquement exclues de la possession de la terre, y compris la  reconnaissance et la compensation financière pour la contribution de ces communautés à la  préservation de l’environnement et au développement durable, et ce, afin de lutter contre les  changements climatiques et le racisme environnemental. 

18. Reconnaître l’importance d’Haïti et son rôle historique dans la lutte contre l’esclavage, le colonialisme et le racisme, en considérant la nécessité que le peuple haïtien soit prioritairement bénéficiaire des mesures pour les préjudices subis dans le processus de décolonisation, et dans ce contexte, soutenir la décolonisation complète de la région caribéenne.